Mon silence

Le très beau poème « D’une ile l’autre » de Ile Eniger que j’ai le plaisir de vous présenter cette semaine m’a rappelé un texte (beaucoup moins talentueux) que j’avais écrit il y a quelques années et que voici. Preuve que ce blog est ainsi modestement un lieu de rencontres.

Non je ne veux pas vous parler de ce silence vide d’une pièce close ou du cercueil refermé,
mais simplement de cette absence de bruit qui permet d’entendre la vie et libère l’esprit.
Instant clandestin, plaisir secret.
Câlinerie du chuchotement des feuilles d’une chênaie.
Douceur du clapotis de la vague enroulée sur le sable.
Volupté du gazouillis fluide du chardonneret posé sur mon figuier.
Tendresse des murmures d’une fillette qui cajole sa poupée, assise dans l’herbe.
Mystère du crépitement des premières gouttes de pluie sur la vitre.
Légèreté du friselis de l’eau de l’étang.
Caresse du bruissement des arbres dans un vent léger.
Intimité des soupirs d’un matin qui se lève.
Émotion de cet instant suspendu à la baguette du chef d’orchestre s’apprêtant à libérer la première note du premier mouvement.
Sensation de paix quand la nuit naissante estompe doucement la petite place de la mairie du village.
Résonance d’un soupir dans un silence tout acquis.
Tendresse d’un murmure, jubilation d’un rire, ensorcellement d’un bruissement.
Paroles à bouches feutrées, paroles d’amour.

Le silence m’écoute, me comprend, m’apaise.
Il m’est charnel comme un plaisir, fidèle comme un ami, chaud comme une laine.
Que mon époque me pardonne, son bruit m’agresse, intolérablement.

Extrait de mon recueil  Sur le fil 

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1 réflexion sur “Mon silence”

  1. « Les premières notes du premier mouvement », voilà qui engage de belle façon à ouvrir l’existence du jour. Votre texte délicat incite à l’état d’être, on y respire large, essentiel, et paisible. Ile E.

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