Un an que nos roses ont fermé leurs paupières. Que leur parfum ne fleurit plus. Un an que notre jardin s’est dissout dans l’or d’une improbable lumière. Depuis ta dernière porte, mes mots se taisent, sidérés. Je t’écris de cette jachère de dernier labour. Je t’écris comme une qui ne sait plus écrire. L’été martèle le mauve des lavandes, le soleil aiguise le rouge des géraniums, un bras de ciel brûlant enlace les terres d’une implacable étreinte. La saison de feu plante ses banderilles. Dans cette fournaise, quelques oiseaux effrontés défient le bleu de plomb fondu. Juillet cherche l’eau. Je pourrais te parler encore de cette saison, ta préférée, où tu puisais puissance et couleur, toi, le vivant tournesol. Mais je ne sais plus dire. Je ne suis plus que ces mots pauvres de sol pauvre, traces malingres épaissies de vide. L’absence a emmené toutes les voix. Mes mains ne boivent plus à la source. Où es-tu maintenant ? Que reste-t-il de l’éblouissement ?
Ile Eniger – Les pluriels du silence – (À paraître)
Mort ou douleur, solitude et vide. Quatre mots. La poésie est d’en parler sans jamais les écrire.
Après relecture je corrige mon premier commentaire :
Amour ou mort, douleur solitude et abandon. Cinq mots. La poésie est d’en parler (de les évoquer) sans jamais les écrire (les nommer).
Et j’ajoute : Ile Eniger, Ile (sans ^)quel beau prénom !! c’est déjà un poème. A sa naissance, ses parents ont ils pressenti (ou inventé ainsi) sa destinée de poète ?? L’arrivée de Robinson ??