Juge et partie?

Quand l’administration est juge et partie, “l’affaire” n’est pas loin!  Est-ce nouveau? Évidemment que non.
Les habitants de Chaudun étaient-ils si malheureux qu’ils devaient absolument partir ou leur a-t-on fait miroiter une vie tellement plus heureuse dans les colonies françaises qu’ils ne pouvaient résister à cette sollicitation par ailleurs assez pressante?
Il est vrai que leur principale ressource, l’industrie pastorale, était en régression permanente pour 3 raisons. Je cite ici le rapport de l’inspecteur de la Direction des forêts chargé par l’Etat de ce dossier, monsieur Billecard : “l’épuisement des pâturages par un usage excessif, la baisse des prix par suite de la concurrence étrangère et enfin l’augmentation incessante des charges communales”. Mais si les revenus étaient faibles, les dépenses l’étaient tout autant.  Cet inspecteur était-il véritablement objectif? Probablement pas.
Les propriétaires, sans doute trop pressés de vendre ont fait une offre , toujours selon lui: “sensiblement inférieure à celle payée pour les acquisitions de terrains similaires dans la région”. Mais il préconise  de considérer les prix proposés comme “un maximum”. Très honnête, vis à vis de gens qu’il décrit si miséreux?
Un propriétaire refusera de brader son terrain. Peu importe, il fait une note indiquant:
“Il ne persistera pas dans ses prétentions lorsqu’il se trouvera seul à habiter à Chaudun et s’il persiste, il sera temps alors d’examiner si l’administration doit faire droit.” En fait il semble que ce Billecard veuille surtout que l’affaire se réalise, sans doute pour son propre avancement. Clairement son intérêt est celui de l’Etat, pas celui des Chauduniers.
Les négociations s’étirant sur plusieurs longues années, les habitants sont désespérés et pressent l’Etat de conclure. Il abondera dans ce sens. Par compassion? Pas du tout: voyez ce qu’il en dit:  “l’administration doit faire des concessions de formes pour dégager la responsabilité d’une situation que l’opinion publique qui lui est si peu favorable dans ce département ne manquerait pas de faire retomber sur elle…”
Voilà un aspect de l’histoire de Chaudun, moins misérabiliste et donc sans doute moins romanesque que la version usuelle, que j’ai découvert grâce à une nouvelle visite aux archives de Gap et au livre très documenté de Monsieur   Escalle     “de Rabou à Chaudun” dont l’édition est malheureusement  épuisée.
Par phases tantôt j’avance dans l’écriture du roman et tantôt je découvre des vérités nouvelles… qui parfois me font modifier le cours de mon scénario. Sans cesse sur le métier… jusqu’à quand?
 “Il ne faut pas faire le civet avant d’avoir le lièvre.”
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