Toujours dans mes pattes, à me narguer, me poursuivre de ses assiduités plus ou moins douteuses ! Mademoiselle Être est insupportable (ça y est, elle recommence…) je disais donc que Mlle Être m’insupporte à toujours fourrer son nez partout dans mes écrits.
Pas de paragraphe où elle ne fait pas son apparition, sous toutes formes d’ailleurs : présent, passé simple, passé composé, futur, imparfait et même plus que parfait et parfois, impératif ! Elle commence sérieusement à me casser les pieds !
Prenez une des plus célèbres phrases au monde : « Être ou ne pas être, telle est la question. » (Merci Monsieur Shakespeare) . Sur neuf mots, elle réussit à s’introduire en douce trois fois, elle a du culot quand même !
Malheureusement, dans bien des cas, on ne peut se passer de cette demoiselle et elle en profite, sachant que, tôt ou tard, elle fera un petit coucou dans un récit. Une vrai glu je vous dit.
Depuis combien de temps sévit elle chez les écrivains ? Je me surprends, lors de mes lectures à compter ses intrusions : hallucinant ! Elle s’incruste, se glisse mine de rien, sous couvert de différentes formulations mais toujours présente. Je l’ai vu jusqu’à trente fois dans une seule page d’un romancier pourtant célèbre. Même les plus grands auteurs ne sont (encore elle ! mais que dire d’autre ?) pas à l’abri de ses turpitudes !
Haro sur la demoiselle, qu’elle disparaisse de notre vocabulaire !
Quand à son grand copain, Monsieur Avoir, on peut dire qu’ils font la paire tous les deux… Relisez les quelques phrases ci-dessus et vous verrez que ce « môssieur » apparaît presque partout ! Comment l’éviter ? Comment écrire un texte sensé sans qu’il n’apparaisse au détour d’une phrase ? Casse-tête, relecture pour éradiquer cet intrus, mais rien n’y fait, il s’incruste et on ne peut pas se passer de lui. Incroyable ! On dirait que la langue française ne tient que par ces deux auxiliaires sournois. Si vous vous passionnez pour les mots croisés, vous trouverez cette définition « auxiliaire de vie » en quatre ou cinq lettres ! Ne vous laissez pas faire, ne tombez pas dans le piège, réfléchissez !
Pire, ce que vous possédez, on dit « votre avoir », c’est fortiche non ? Nous sommes des êtres pensant (pardon, des humains pensants). Vous voyez, malgré tous mes efforts, je ne puis me passer d’eux ! Alors, je cède, je baisse les bras : je suis, tu es il est, nous avons, vous avez, ils sont des emmerdeurs, pas moyen de passer outre alors, je décide de ne plus écrire un mot ni de parler car, même dans les conversations, les moindres paroles, ils apparaissent en catimini. Essayez de discuter avec quelqu’un sans que ces deux sans-gêne s’infiltrent insidieusement , impossible ou alors il vous faut parler avec un style ampoulé et tout le monde vous regardera de travers, en se disant : quel pédant celui-là !
Ah ! Messieurs Molière, Racine, Corneille, vous les génies du français dont on nous rabattait les oreilles à l’école, pourquoi oui, pourquoi, vous aussi, tomber dans ce piège infâme ? Vous me direz « à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire » (sic), mais, le péril nous poursuit, nous talonne, ne voyez-vous pas ?
Allez, je vous laisse à vos réflexions et, comme le dit l’adage, « il faut d’abord être avant d’avoir » !
Jean Duby
Jean Duby a publié plusieurs romans tel que Le manoir de Saint Léobin et des recueils de nouvelles dont Le coffret de Joseph; tous parus chez Edilivre et disponibles notamment chez Amazon.
Il est membre de l’association des Romanciers Nantais.
Son dernier livre, le supplicié des Souzeaux, est aussi son premier roman policier.
Très amusante réflexion sur un vrai problème pour ceux qui écrivent !
Excellent !! Je adorais … Comment dire … ?
Merci ! Pour cette vitalité surprenante emprunt d’un souffle de vie …
Après un doute, j’ai vraiment cru qu’il était bien inscrit « Jean Duby a oublié plusieurs romans tel que …/… », mais non il s’agissait bien de « …/… a publié …/… »,
Ces petites bêtes là, que l’on nomme des fautes de frappe ou des coquilles, peuvent également avoir tout leur charme … ! Rien qu’en avoir tel que celui-là, il en prend consistance jusqu’à être … , et en porter la réflexion …
Ah! j’ai été eu ! c’est sûr, j’ai eu du bien être à lire ça !